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Mon blogue

2001, l'Odyssée d'une vie de rêve

20 ans plus tard, j'ai encore du mal à croire à quel point j'ai été chanceux. Je n'aurais jamais pu deviner que ma vie allait changer à ce point et pour le mieux. J'ai déjà raconté cette histoire sur des sites aujourd'hui disparus et en privé sur les applications de rencontres. Plus je le fais, plus j'hésite à le faire, car il semble que certains ont l'impression de recevoir en pleine face notre bonheur comme s'il s'agissait d'un verre de vin ou d'un cracha. Alors si vous êtes de ces gens qui se sentent malheureux lorsque les autres semblent faire étalage de leur bonheur, peut-être serait-il préférable de cesser la lecture de ces lignes ? D'un autre côté, je peux vous assurer que ces années n'ont pas été le parfait bonheur tous les jours. Comme tout le monde, nous avons eu des hauts et des bas. Comme tout le monde, nous avons nos différends. J'y reviendrai...

Environ un mois avant mon anniversaire de l'an 2000, j'ai rencontré un homme. En fait, c'est lui qui est venu à moi alors que je me trouvais perdu dans mes pensées. À ce moment-là, j'étais triste. Je ne veux pas entrer dans les détails, mais je dois tout de même mentionner que je me trouvais dans un endroit fréquenté exclusivement par des hommes. J'avais donc passé les quelques heures qui précédaient à observer ce qui se passait autour et j'ai remarqué que beaucoup d'hommes d'un certain âge arrivaient seuls et repartaient seuls. Alors je me suis dit que c'est ce qui risquait de m'arriver à moi aussi. Vivre seul et finir ma vie seul.

Puis, il est apparu. En fait, il devait être là depuis un moment. Il se tenait à quelques mètres et me regardait semblant ne pas trop savoir quoi faire. Il était peut-être un peu gêné. Alors, après une brève hésitation, je me suis précipité, craignant qu'il se sauve, je lui ai tendu la main et je l'ai tiré à moi pour le serrer dans mes bras. Nous sommes restés ainsi un bon moment. Après environ une minute, cet homme s'est comme « relâché » soudainement dans mes bras. Peut-être était-ce stupide de ma part, mais j'ai donné à cela beaucoup plus de sens que je n'aurais dû. Certaines personnes parlent de « coup de foudre », mais je ne crois pas que c'était cela.

Quelques heures plus tard, je l'ai accompagné à vélo jusque chez lui en empruntant un pont pour traverser un fleuve et jusqu'au cœur de la plus grande ville de notre petite province. Ville que je n'avais visitée qu'en de très rares occasions auparavant. La soirée ne fut pas extraordinaire et je me surpris d'accepter de passer la nuit près de lui dans son lit. En fait, je ne me voyais pas refaire tout le trajet en sens inverse seul au milieu de la nuit. Le lendemain au réveil il me dit « Je viens de sortir d'une relation de dix ans alors je ne suis pas prêt à avoir un chum encore, mais on peut se revoir si tu veux ».

Je ne lui ai jamais dit, mais j'ai presque failli me mettre à pleurer quand j'ai entendu la première partie. Puis je me suis dit qu'en réalité moi non plus je ne voulais pas de chum. Je n'en avais encore jamais eu et le fait que je vive encore chez mes parents risquait de poser problème. S'il m'arrivait de mentir ou de cacher des choses à ma mère, je finissais généralement par tout lui dire. Alors je me suis toujours dit qu'il valait mieux que j’aie quitté mes parents avant de me permettre toute relation. Je pensais déjà ainsi longtemps avant de comprendre que je préférais les garçons alors rien à voir avec l'inquiétude de faire un comingout.

J'ai donc accepté la proposition offerte de revoir cet homme. Chaque fois que je me présentais devant lui, il était tout sourire. Alors je croyais que malgré son discours, il m'aimait bien. Plus je le fréquentais, plus j'en apprenais à son sujet, sa façon de penser et de voir le monde, plus je trouvais qu'il était le bon pour moi. Et à voir comment il semblait heureux de ma présence, j'ai cru que lui aussi il était tombé amoureux. Mais selon lui, ça n'était pas encore le cas, ce serait venu plus tard. Ou est-ce seulement qu'il ne se rendait pas compte de ses propres sentiments, jusqu'au jour où un incident lui fit craindre pour ma vie. Incident que je ne raconterai pas ici.

Dans mes souvenirs, il a toujours été très protecteur avec moi. Par exemple, lors de nos premières semaines, je voyais son colocataire (qui était aussi son ex) faire des rencontres par Internet à l'aide de divers sites web de l'époque. Alors j'ai demandé si je pouvais m'inscrire moi aussi et tenter de faire pareil. Si j'avais réussi à mettre la main sur un vieux pentium chez mes parents, nous n'avions pas d'Internet, ma mère ne l'aurait jamais permis. Bref, lorsque j'ai fait cette demande, mon nouvel ami s'est comme tout de suis mis en colère, me disant qu'il ne voulait pas qu'on me ramasse à la petite cuillère. Quelque part il n'avait pas tort, il suffit de penser à Magnotta... D'ailleurs cela se passait quelques années avant cette histoire d'horreur.

Bref, sa réaction me fit beaucoup plus d'effet qu'elle n'aurait dû. Déjà lorsque j'étais enfant, si ma mère avait peur de quelque chose, j'avais peur moi aussi. Par exemple, quand je suis malade, si la personne qui s'occupe de moi s'inquiète, je vais me sentir plus mal et m'inquiéter aussi. C'est peut-être une forme d'empathie. Ça m'a pris quelques années pour comprendre que mon nouvel ami était en fait du genre « overreact » face à certaines choses. Ainsi, il me fallut des années avant de pouvoir rencontrer en vrai un gars trouvé sur une application de rencontres. Ce ne fut pas un très grand succès d'ailleurs, mais il s'agit d'une autre histoire.

Après cette première nuit passée à serrer mon nouvel ami dans mes bras dans son lit, j'ai décidé d'accepter la proposition que l'on se revoit. Durant les semaines et les mois qui ont suivi, nous sommes sortis un peu partout dans la ville, surtout en intérieur, car c'était l'hiver. Nous avons fait les musées, divers évènements et expositions. Chaque fois que je le rencontrais quelque part, il était tout souriant en me voyant arriver. Peu à peu, il a commencé à dire à tout le monde que j'étais son chum. Et moi ça me gênait quand il faisait ça avec des inconnus qui n'avaient pas besoin de savoir.

Au printemps, il me demanda de l'accompagner en visite chez un couple de ses amis en Outaouais. Un couple hétéro avec des enfants dans une grande maison de campagne. Tout le long du séjour, je m'y suis senti comme un poisson hors de l'eau ou un chien dans un jeu de quilles. Je n'étais pas à ma place. Mon chum était constamment en « grande conversation » avec ses amis sur des sujets dont je ne savais rien et les rares fois où j'aurais pu dire quelque chose, il me coupait la parole et il parlait par-dessus moi. J'aurais vraiment préféré ne pas l'accompagner.

Au retour, ce fut la catastrophe. Mon chum m'a dit de ramasser mes affaires et de retourner chez mes parents afin d'apaiser son ex et coloc qui lui devait une somme conséquente, en plus de payer une part du loyer. L'ex avançait comme argument que j'étais toujours là dans leur appartement sans que mon chum me demande de payer ma part du loyer. Mais nous venions de rentrer d'une fin de semaine épouvantable et je voulais rester avec mon chum. Mais lui, il était souvent très autoritaire avec moi, peut-être parce qu'il est plus âgé. Bref, cette demande de mon chum était comme une goute de trop dans un vase déjà bien rempli. Je me suis fâché et nous avons rompu.

« C'est fini ! » lui ai-je crié à un moment donné. Mon chum s'est mis à pleurer. Je ne m'y attendais pas. C'est ainsi que j'ai compris que je l'aimais vraiment, que j'ai compris l’énormité de l'erreur que je venais de commettre. Néanmoins, j'ai ramassé mes affaires, toutes mes affaires. Mon chum a même dû me prêter un vieux sac de sport en plus de celui que j'avais déjà et de mon sac à dos. J'ai eu un peu de mal à rentrer chez mes parents sur la Rive-Sud en métro et autobus avec tout ce fourbi.

Je ne me souviens pas combien de temps je suis rester à pleurer en silence dans ma chambre, mais un jour je me suis décidé, je lui ai téléphoné. Nous avons recommencé à nous fréquenter, à l'extérieur, et je retournais toujours chez mes parents entre chaque sortie. Puis mon chum et son ex ont déménagé chacun dans un nouvel appartement. Je lui rendais visite presque chaque fin de semaine cet été-là et un jour il m'a demandé de venir habiter chez lui. Malgré des hauts et des bas, nous ne nous sommes plus jamais quittés. Et des années plus tard, il lui arrive de me dire « Je ne sais pas ce que j'aurais fait si tu n'avais pas été là. » Ou d'autres trucs du genre. Je crois que c'est réciproque...

Il y aurait évidemment beaucoup plus à raconter, mais ce sera pour une prochaine fois.

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